Ce gendarme invincible et invisible
On parle beaucoup des bienfaits de la pratique de la pleine conscience pour aider à ralentir sa course et prendre le temps d’observer ce qui se passe en soi et autour de soi. Oui la conscience a beaucoup à nous enseigner si on prend le temps d'écouter cette petite voix que nous avons tous au fond de nous. D'ailleurs, l'origine du mot provient du latin conscientia qui signifie: « avec la connaissance ».
« La conscience, dira l'éminent styliste français Théophile Gautier, est ce gendarme invincible et invisible à la fois, qui vient vous mettre la main sur l'épaule, et vous dit d'une voix basse, entendue de nous seuls: Je vous arrête! »
« Il n'y a rien de si évident pour la conscience que la conscience même; » dira Joseph de Maistre.
Geruzez continue: « La conscience est le sens intime, la vie intérieure. »
« La conscience est le meilleur livre de morale que nous ayons; » a dit Pascal.
« Dieu nous a donné la raison pour connaître ce qui est bien, la conscience pour l'aimer, et la liberté pour le choisir. » J.J. Rousseau
« La conscience, dira Eugène Richer dit La Flèche, c'est le dernier vestige de Dieu dans l'homme », autrement dit: c'est la loi divine dans ses derniers échos, ses derniers vestiges, ses suprêmes débris. C'est la voix aphone de la justice; c'est l'oeil invisible du suprême arbitre.
« On appelle conscience, dira Larousse, le privilège que possède l'âme de se connaître elle-même. »
La conscience est comme un miroir
La conscience pourrait être comparée à un miroir qui reflète intérieurement toutes nos actions. Le miroir ne peut se voir lui-même, mais il renvoie l'image de celui qui se mire en son sein. Ainsi la conscience, comme une glace insensible, reflète d'une invisible façon, mais comprise par l'âme seulement, les actions qui passent devant cet imperturbable arbitre. Comme la conscience est un des derniers vestiges de Dieu dans la chair humaine, on ne peut la corrompre, ni la séduire, ni l'amadouer. Le miroir est là, invariable, constant, apathique, accusateur, incorruptible, inséduisible. Parfois, le moi, l'égoïsme souverain de la chair, l'imagination, cherchera des alibis, des excuses; mais la conscience, miroir implacable, jugement inexorable, est insensible; elle est comme l'épreuve d'une photographie, enregistrant tout ce que renferme le panorama, les objets admirables comme les laids, les hideux aussi bien que les plus magnifiques.
Puisque l'homme n'a pas voulu conserver en lui la divinité, la Nature qui l'eut rendu si heureux, Dieu l'en a châtié sévèrement en laissant au fond de lui-même l'invisible attirail de Sa souveraine Justice: la conscience, inexorable tribunal qui dissèque un à un les menus détails de la conduite humaine, sans en oublier la moindre péripétie, la coulpe la plus insignifiante, ni la parole la plus vaine. Tout cela apparaît affreux, fantomatique, menaçant, à la dernière heure du moribond, comme pour lui reprocher une dernière fois, avant de quitter sa guenille charnelle, son irrémissible forfait d'avoir évincé Dieu de son corps. Mais Dieu n'y est pas parti entièrement; Il y est demeuré comme Juge seulement, non plus comme père, comme bienfaiteur, comme providence, mais comme Justicier. «Tu m'as chassé! semble dire le Créateur. C'était de ton affaire; mais comme tu es méchant, vicieux, hypocrite, vindicatif, voleur, meurtrier, je resterai au fond de toi, pour épier toutes tes actions mauvaises, qui te tourmenteront sans cesse par le souvenir de Ma bonté, que tu ne possèdes pas; de Ma Puissance dont tu t'es privé toi-même en m'expulsant de toi; de mes trésors, que tu as méprisés, pour servir mon ennemi, Satan.»
Cela n'est qu'une partie du drame, et non pas la plus odieuse. Voici la seconde. Satan, l'éternel ennemi de la Lumière, le perpétuel contradicteur, s'est bien aperçu que Dieu était demeuré dans l'homme à l'état de conscience. Alors, il entreprit de fausser cette conscience, de barbouiller cet auguste tableau. Il commença tout d'abord par s'assujettir des suppôts, qui, sous le manteau d'une piété superficielle, d'une dévotion de mise en scène seulement firent profession, en bons directeurs, de troubler et d'utiliser la conscience humaine pour en retirer de lucratifs profits avec la monétisation d'indulgences.
Gustave Robitaille